Les chats libres... de mourir

Publié le 23 Janvier 2013

Eprouver de la compassion pour les chats sans foyer est un sentiment bien naturel chez les personnes dotées d'une sensibilité normale. Pour elles, leur porter secours va de soi.

C'est en voulant aider une voisine, fidèle nourricière des chats du Cimetière Montmartre, que Michel Cambazard, photographe, va se retrouver défenseur des chats errants. C'est lui qui, révolté par le sort habituellement réservé à ces chats (capture, mise en fourrière, euthanasie) va fonder le Comité de Défense des Bêtes Libres du Cimetière Montmartre.

Dix neuf juin 1978, Nicolas est capturé (je vous rassure ce Nicolas n'est pas un petit garçon mais un chat), stérilisé, identifié pas seulement par une encoche à l'oreille, mais par tatouage au même titre que les chats nantis d'un pedigree ou simplement d'un maître, au Fichier National Félin et relâché sur son territoire. Il est le premier chat libre officiel de France. Rapidement d'autres Comités voient le jour à Paris, en banlieue puis en province pour défendre les chats mal aimés et trop souvent traités comme de la vermine.

Sous l'impulsion des responsables de ces Comités et des Associations de protection animale, notamment notre Confédération, la Loi de janvier 1999 officialise définitivement le statut de Chat Libre.

Oui, mais... ces chats sont-ils heureux ? Que signifie liberté ? Peur, froid, faim, douleur de blessures ou de maladies non soignées, est-ce une liberté enviable ?

Deux exemples récents vous donneront la réponse. Jeudi 10 janvier je reçois un appel d'une habitante d'Evry. Depuis plus de deux mois elle nourrit un chat dans la rue. <<Quelque chose de va pas, il a un morceau rose de je ne sais pas quoi au derrière...>>

Il y a un mois cette personne a appelé les pompiers, consciente qu'il fallait intervenir. Les pompiers sont venus, ils ont, sans conviction, essayé d'attraper le chat qui s'était faufilé sous un buisson et ont vite renoncé. Cette dame a ensuite tenté de contacter des associations de protection animale, en vain. <<Je suis tombée sur un répondeur qui ne prend pas les messages ou, si j'ai pu laisser un message, personne ne m'a rappelée.>>

Finalement c'est la Fondation Brigitte Bardot qui lui a donné mon numéro de téléphone. Comme notre Association ne recense aucun bénévole dans ce secteur, je lui ai juste conseillé de faire entrer le chat, à l'aide d'une gamelle de nourriture, dans un panier de transport -qu'elle possède- et de le conduire à Morsang-sur-Orge chez notre vétérinaire qui aura été prévenu de cette urgence.

C'est seulement le samedi 12 que le malheureux chat est arrivé à la clinique vétérinaire et aussitôt pris en charge. La bilan dressé par le Docteur Giraud était plutôt désespérant : chat d'une couleur indéfinissable tant il était sale, anémié et deshydraté au dernier degré et le "morceau rose" était un important prolapsus rectal. Il était peu probable que l'intervention qu'il avait faite pour le réduire tiendrait. Au cours du week-end, notre vétérinaire n'a pas ménagé sa peine pour maintenir ce chat en vie avec l'assurance que son patient ne retournerait pas à la rue car, à quoi bon soigner ce chat, s'il devait se retrouver dans les mêmes conditions de vie déplorables. Darling avait été euthanasiée la veille, j'avais un chat de moins, si celui-ci pouvait être sauvé, je retrouverais le même nombre de chats !

Lundi 14 janvier quand je suis allée chercher Darling pour la faire incinérer, j'espérais avoir de bonnes nouvelles de notre nouveau protégé pour compenser ma peine. Hélas, Aurélie, l'adorable infirmière m'apprit que l'intervention sur le prolapsus rectal n'avait pas tenue et que l'état du malade ne présentait aucun signe d'amélioration, bien au contraire. J'ai rarement vu Aurélie aussi bouleversée. Elle m'a confié que la vision de ce pauvre animal lui était insupportable tant sa misère physiologique était grande. Pour tout dire elle m'a déconseillé de le voir et m'a juste proposé de regarder la photo qu'elle avait faite. La seule vue de la photo m'a rendue malade ! Il est des cas où la seule chose à faire pour un animal est de mettre fin à sa pauvre vie. C'est ce qui a été fait ce jour là.

Les jours se suivent et se ressemblent parfois... mercredi 16 janvier au matin, alors qu'elle quittait son service de nuit, Laetitia P. aide soignante au Centre Médical de Bligny a trouvé, devant la porte de son service, un chat gris visiblement très malade et présentant une grosse boule dans le cou. Comme elle habite non loin de Morsang-sur-Orge, nous lui avons demandé si elle pouvait déposer ce chat chez notre vétérinaire, ce qu'elle a fait.

Je l'ai appris en fin de matinée, ce chat, en fait une chatte grise "chartreux" était dans un tel état d'hypothermie qu'il n'a pas été possible de l'anesthésier pour soigner l'énorme abcès de son cou. Perfusée, réchauffée, la malheureuse chatte a glissé doucement dans la mort.

Bien que ça n'allait rien changer à cette fin j'ai voulu savoir qui elle était. Le tatouage présent dans son oreille, en grande partie illisible n'a pas permis d'établir son identité. Etait-elle la chatte qu'un patient (décédé depuis) avait apportée avec lui lors de son hospitalisation, n'ayant personne pour la garder ? Etait-elle une chatte que nous avions faite stériliser et tatouer des années plus tôt ? Nous ne le saurons jamais.

Alors, qu'en pensez-vous, est-ce un sort enviable celui de chat libre ?

Rédigé par Monique

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O
buen artículo .. seguir trabajando
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M
MERCI !
K
Un très bel article !!
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