Publié le 30 Janvier 2013
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Tout comme Piano dont je vous ai raconté l'histoire au début de ce mois, Chipie, dont la photo figure sur la page d'accueil de ce blog, était née dans le parc du Centre Médical de Bligny. Nous l'avions capturée au mois d'octobre l990. Je dis bien "capturée" car si elle n'avait guère plus de trois mois, elle était déjà une vraie petite sauvageonne, trop jeune pour être stérilisée avant de retourner là où elle était née, d'une chatte abandonnée qui avait échappé à la dernière "déchatisation" du mois de mars. Son comportement ne laissait aucun espoir de trouver pour elle une famille adoptive. Considérant que la meilleure défense c'est l'attaque, elle crachait et grognait, menaçante, oreilles rabattues quand je m'approchais d'elle. Je la trouvais touchante cette petite chose apeurée et je décidais de l'adopter car je n'imaginais pas de pouvoir la remettre dans les bois après l'avoir gardée chez moi pendant les quelque trois ou quatre mois qui s'écouleraient avant qu'elle ne soit stérilisée.
Pendant quatre ans elle vécut sa vie de chat qui ne recherche pas trop la compagnie des humains. Chaque année elle se laissait enfermer dans un panier de transport et conduire chez le vétérinaire où elle recevait ses vaccinations sans broncher mais toujours visiblement apeurée. Il fallait lui parler doucement à ma Chipie et ne pas avoir de gestes brusques, notre vétérinaire faisait ça très bien.
Un jour du mois de juin 1994 -elle avait quatre ans- je m'aperçus qu'elle n'était pas "dans son assiette". Son "docteur" habituel ne travaillait pas ce jour là, aussi, un peu inquiète, je la conduisis chez une de ses consoeurs. Auscultation, palpation, prise de température...A priori tout semblait normal sauf, peut-être, les ganglions dans le cou un peu trop gros, mais <<rien d'inquiètant, c'est peut-être un problème dentaire, voyez sa gencive est un peu rouge....surveillez-la et si dans une semaine vous ne la trouvez pas mieux, nous ferons un bilan sanguin...>>.
Dès le lendemain, Chipie et moi prîmes le chemin de Morsang-sur-Orge, direction notre vétérinaire préféré. En fait de gencive un peu rouge, le Docteur Grosset remarqua immédiatement la pâleur des muqueuses de la chatte. Non, décidemment Chipie n'allait pas bien ! On n'allait pas attendre une semaine pour effectuer ce bilan sanguin. Le sang prélevé apparu tout de suite anormalement pauvre en hémoglobine. Chipie était gravement anémiée, c'est ce que confirma l'analyse. Restait à trouver la cause. Aurait-elle absorbé un poison de type raticide qui provoquerait une hémorragie interne ? La dose de vitamine K1 que Chipie reçue ce jour là ne changea rien à l'état de la malade. Dès le lendemain le vétérinaire me fit part de son diagnostic : leucémie.
Pouvait-on espérer guérir Chipie ? On pouvait toujours essayer...mettre en oeuvre une chimiothérapie. J'ai beaucoup appris en fréquentant les vétérinaires, notamment qu'un seul produit de chimiothérapie pouvait être administré aux chats mais que cette forme de leucémie n'y serait peut-être pas sensible. Chipie resta hospitalisée pendant deux semaines. Elle répondait favorablement au traitement mais la partie était loin d'être gagnée. La malade était encore bien faible, sans appétit, quand elle revint à la maison. Il fallait pourtant qu'elle mange, de gré ou de force. C'est ainsi que je commençais à la gaver à la seringue avec des aliments hautement nourrissants qu'elle vomissait à peine avalés. Je lui laissais quelques minutes de répit et je lui faisais avaler une nouvelle dose... Peu à peu elle perdit les poils de la face, son visage en vint à ressembler à un masque de cuir et je continuais à la gaver du mieux que je pouvais. Autour de moi mes proches m'accusaient de la martyriser, ils prédisaient qu'elle mourrait après avoir inutilement souffert et que la charité consistait à la faire "endormir"...
Régulièrement selon le protocole établi je la conduisais chez son vétérinaire pour les séances de chimiothérapie. Dois-je vous rappeler combien Chipie était craintive ? Elle semblait toutefois faire confiance à l'équipe soignante qui s'isolait avec elle dans un endroit tranquille pour lui adminitrer sa piqûre par voie intraveineuse, sans anesthésie, en lui parlant doucement, caressant son petit museau.
Chipie et moi avons eu raison de faire confiance à notre <<Jean-Luc>> !! Notre chatte a survécu à cette épreuve. On appelle ça rémission je crois. Chipie a retrouvé ses poils, ses globules rouges, son bel appétit et les arbres de mon jardin en particulier le cèdre dans lequel elle restait perchée pendant des heures. Chacune des prises de sang de contrôle effectuées par la suite ont confirmé qu'elle allait bien. Le Docteur Grosset a gardé pendant longtemps la photo de Chipie sur son bureau, tout heureux de cette belle réussite.
Notre Chipie aura vécu plus de seize ans. Une pancréatite s'est déclarée au mois d'août 2006, les soins prodigués pendant plusieurs semaines ont été inutiles...C'est encore son "docteur" qui lui a permis de s'endormir le 2 novembre 2006 avec toute la délicatesse qui le caractérise.